Vu le 19 juin 2013
Après avoir
empoisonné la terre/dû s’en exiler à cause des aliens/en être chassés par une
nature devenue hostile (choisissez), les humains ont colonisé les étoiles et développé une armée
spécialement entraînée à ne pas ressentir la peur. Mais le général Cypher
Raige, inventeur de la technique et héros de guerre, se retrouve sur la planète
maudite suite à un crash. Il est blessé et son fils est la seule personne sur
laquelle il peut se reposer pour aller chercher une balise à cent kilomètres de
jungle de là.
J’ai été un grand fan de M. Night Shamalayalayan. J’adore
Sixième sens, Incassable, et même Signes
et Le Village (pourtant plus
discutables). Mais quand on a vu La Jeune
Fille de l’eau et, surtout, l’imbuvable Phénomènes,
ça vous dégoûte un peu du bonhomme. Au point que je n’étais plus allé le voir
en salle. Mais les fours successifs ont paraît-il forcé le réalisateur à mettre
de l’eau dans son vin, et l’occasion de le voir mettre en scène un acteur aussi
charismatique que Will Smith m’a incité à lui laisser une nouvelle chance. Et… bon,
prenons les choses dans l’ordre.
L’œuvre est bien filmée, possède une prémisse claire et
(un peu trop) simple : le fils de Raige doit franchir les cent kilomètres
qui le séparent de la balise avant que son père ne calanche. Bien sûr il y a
des monstres, des épreuves, le moyen de communication n’attend qu’une occasion de
tomber en panne, le croquemitaine qu’ils transportaient dans le vaisseau rôde
aux alentours… on ne sera jamais vraiment surpris par le film, mais on ne peut
pas dire qu’il soit mal filmé*.
Les créatures alien chassent les humains en se guidant
sur leur peur. Will Smith incarne donc un militaire stoïque qui a appris à
chasser toute peur, et en fait toute émotion de son esprit. Un père dur,
inflexible, à la limite de la psychopathie, vers lequel le fils porte un regard
admiratif sans ambiguïté. C’est une des idées du film : pour devenir un
homme, un protecteur, il faut surmonter la condition d’homme. Vaincre la peur,
c’est vaincre en même temps toutes les émotions et se couper en quelque sorte
du reste de l’humanité. Ce n’est pas nouveau, ni même original au cinéma (ça
fait mal de référencer ça mais… même la prélogie Star Wars tentait d’aborder ce thème à travers les personnages
d’Obi-Wan et Anakin).
Et je comprends cette idée. C’est un concept très
intéressant, important, crucial même pour comprendre certains aspects de la
société. Il soulève notamment cette question : si pour survivre l’humanité
doit perdre son humanité, on est face à un paradoxe assez désagréable, qui
sous-entend que les soldats sont des personnes dont la société sacrifie l’humanité
pour une cause plus grande. Le film aimerait aborder ce sujet, il essaie
d’apporter des nuances (notamment avec la scène – relativement ridicule – du
nid du rapace**). Seulement il n’arrive pas à être clair vis-à-vis de ces idées
(entre autres à mon avis parce qu’il n’a qu’à moitié conscience qu’il est en
train de les traiter). En outre, on note un absent de marque dans un film où
seulement deux acteurs se donnent la réplique : le charisme. Jaden Smith
n’en a aucun et, bizarrement, Will Smith non plus ! Leurs personnages sont
également insupportables, chacun à sa manière extrême : Will est trop
psychotique, Jaden trop geignard, et on a du mal à souhaiter que l’un apprenne
de l’autre tant les deux gagneraient à crever.
Et là se pose la question du choix de Will Smith. Il y
a des comédiens qui ne sont pas simplement de bons acteurs, ce sont des
vecteurs de cool. Des mecs qui, insérés dans un film, multiplient
instantanément le niveau de cool du film par dix***. Mais ici, Smith passe le
film assis, le visage fermé, chassant toute émotion. Ce qui est cohérent dans
l’histoire, mais qui en termes de jeu d’acteur limite quand même beaucoup les
effets. L’explication apparaît lors du générique de fin. « Histoire : Will Smith ; producteurs :
Will Smith et Jada Pinkett Smith (sa femme et mere de Jaden) ». De là
à conclure que ce n’est pas Shayalahammam qui a voulu bosser avec les Smith,
mais les Smith qui ont choisi Shayamarmeladaman pour réaliser un joli tremplin
pour la carrière de leur progéniture…
After Earth, M. Night Shaylamanamanamn, 2013
* Même si, comme vous l’aurez remarqué, le script a des
nuances de jeu vidéo : on finit le niveau de la jungle, on combat un boss,
on arrive au niveau de la chute d’eau, on combat un boss, etc. Ça plus quelques
astuces scénaristiques ad hoc assez
foireuses (la chute brutale de température la nuit qui force à trouver un abri,
le rapace…) ne jouent pas en faveur du film.
** On y notera également une autre grande faiblesse,
récurrente celle-là, des films de Shamallow : les images de synthèse
foireuses. Souvenez-vous de la fin de Signes
et de son extraterrestre tout pourri dont la seule vision cassait
instantanément la force de la scène. Ben là c’est pareil. Les effets
« physiques » sont impeccables, mais sitôt qu’on part sur du
numérique ça merdoie.
*** Bill Murray,
Vince Vaughn, Bruce Campbell, Kevin Smith… et Will Smith. Ça
ne transforme pas les navets en bons films, mais ça en améliore
incomparablement certaines scènes.
Zut alors, moi qui avait été cueilli par la bande annonce, je suis refroidi. C'est un film qui finira télé... sur mon ordi.
RépondreSupprimerC'est si plat que ça?
En fait, bizarrement, je pense que c'est un film qui aura ses fans inconditionnels. Pour peu qu'on soit indulgent envers Shyamalan (yes !) et le jeu des Smith, on peut y trouver plein d'idées intéressantes. Mais pour moi il y a vraiment trop de trucs qui pèchent, et les concepts audacieux ont l'air d'être là par hasard.
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