Euh... la Fête du cinéma à mon époque, c'était 10 francs la séance ! 10 francs ça fait 1,50 euro, pas 3,50 ! |
Quand
j’étais plus jeune, étudiant, j’adorais la
Fête du cinéma. On pouvait à l’époque aller voir tous les films qu’on
voulait pour une somme dérisoire (dix francs je crois…), et on enchaînait
trois, quatre films dans la journée, dans une ambiance complètement dingue
(enfin, c’était pas Burning Man, mais quand même…). Comme en plus ça tombait
toujours dans des périodes de creux au niveau des grosses sorties (comme par
hasard !), c’était l’occasion de visionner les plus abominables bouses, et
j’en ai vu des merdes, des Sexe Intention,
des Mod Squad… et aussi quelques
perles dissimulées (The Faculty par
exemple).
Le
tout dans une ambiance, disons-le, franchement décomplexée. La Fête du cinéma,
c’est l’occasion pour beaucoup d’aller hanter les salles obscures auxquelles
ils ne rendent visite qu’une ou deux fois l’an pour découvrir à moindre frais
l’une ou l’autre nouveauté. Et comme tous les noobs, les dilettantes du
septième art envahissent cet univers sans en maîtriser les codes. Et ça parle
pendant le film, et ça gigote, et ça tape dans le dossier du siège avant sans
s’en rendre compte, et ça mâche bruyamment son mauvais maïs, et ça consulte son
téléphone, voire ça répond en live !
À
l’époque cette attitude m’agaçait déjà, eh bien je l’ai retrouvée avant-hier en
allant visionner Oz the Great and Powerful,
que j’évoquai tantôt. C’était en effet encore le Printemps du cinéma, une célébration païenne visant à remplir les
salles de soudards avinés et de pétasses bavardes n’ayant aucun respect pour
les films qu’ils viennent voir. Entendez bien sûr par là : « n’ayant
pas la même attitude que moi ! »
Vous
savez pourquoi je n’aime pas trop ce genre de manifestations ? Parce
qu’elles me rappellent à chaque fois à quel point je suis devenu un connard
élitiste. Je ne supporte plus que quelqu’un murmure sur le siège à côté (sauf
quand c’est moi et que le film est mauvais, bien sûr), ça m’énerve quand un
type se mouche toute la séance à deux rangées de là (sauf quand c’est moi,
c’est quand même pas ma faute si je suis malade !), la VF m’insupporte au
plus haut point (sauf quand c’est… ah ben non ça marche pas là !).
Il
y a plusieurs façons d’apprécier le cinéma. On peut y aller très sérieusement,
un peu comme moi ; même quand je vais voir Hansel et Gretel je laisse au film une chance et je reste
silencieux jusqu’à la fin du générique. Et puis on peut aussi renouer avec la
vision ancestrale du concept, et y aller comme à un divertissement collectif
devant lequel il est permis de s’enthousiasmer, de rire ou de commenter, dans
la limite du raisonnable, sans rentrer dans des considérations techniques*.
Tous les films ne sont pas des œuvres d’art immortelles et quand bien même,
beaucoup se satisferaient d’un bruit de fond. Je me souviens du témoignage de
Boulet qui évoquait les projections au Tchad, où le public passait son temps à
hurler, à manger, à vivre devant l’écran**.
Il
y aura toujours des séances pour les gens qui aiment voir les films en paix.
Mais il faut être bien conservateur, bien jaloux de son petit pré carré de « cinéphile »
pour refuser aux non-membres de la communauté, aux profanes du septième art
l’entrée au temple sous le prétexte (souvent fallacieux, toujours insultant) qu’ils
« ne comprennent pas ». Le cinéma est un des rares arts restés
ouvertement populaires, nous devrions nous réjouir que des non-habitués y
viennent, même ponctuellement.
Après,
si on pouvait interdire les basketteurs de deux mètres cinq, ça m’arrangerait !
* Ce qui va de la
chasse au faux raccord à cet élément de détail que les professionnels appellent
« jeu d’acteur ».
** Notes t. 2, Le Petit
Théâtre de la rue.
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