C’est par une nuit bien poisseuse que la
nana est entrée dans le bureau de Lewton. Bien sûr elle avait une affaire pour
lui, une affaire tout aussi poisseuse. Il s’agissait de retrouver son amant, un
certain Mundy. Comme si c’était facile de retrouver un péquin dans
Ankh-Morpork, la ville la plus dense du Disque-Monde ! Mais bon, chacun
son gagne-pain, et celui de Lewton, c’était de retrouver des gens. Alors il s’y
est collé. Mais il pensait pas que ça le mettrait dans un tel pétrin.
L’univers
de Terry Pratchett a connu plusieurs adaptations : en téléfilms, comme
nous l’avons vu, en feuilletons radio*, en bande dessinée (il existe une
version de Au Guet ! parue chez
L’Atalante, au style graphique… bizarre)… et en jeux vidéo. Discworld est une
licence extrêmement connue des jeux PC, appartenant au style aujourd’hui un peu
désuet du point & clic. À savoir : des jeux d’aventure et d’enquête où
vous vous contentez de cliquer sur l’écran pour faire interagir le personnage
avec son environnement et les différents éléments (les plus connus étant ceux
de LucasArts comme Monkey Island ou Day of the Tentacle).
Les
deux premiers Discworld, qui
mettaient en scène Rincevent et le Bagage, ont conservé leur réputation de jeux
fun mais interminables tant la difficulté des énigmes était délirante. En fait,
il fallait avoir l’imagination de Pratchett lui-même pour finir ces jeux, ce
qui a laissé pas mal de joueurs sur le carreau à une époque où « aller
chercher la solution sur le net » n’était pas possible. Mais en 1999, un
nouveau jeu a débarqué sur PC (et quelques supports consoles), tout en 3D
(enfin, ce qu’on appelait de la 3D à l’époque) : Discworld Noir. Si j’en
parle, c’est notamment parce qu’il constitue pour ainsi dire un roman à part
dans l’univers du Disque-Monde.
En
effet, Discworld Noir se situe comme son nom l’indique dans l’univers
du film noir. Jamais Ankh-Morpork n’a autant ressemblé à Casablanca, et les
références aux classiques du genre (Le
Faucon maltais, La Soif du mal…)
abondent. On dirige donc Lewton, privé dur à cuire à la réplique cinglante, qui
enquête sur une disparition pour le compte d’une riche femme fatale. On devine
déjà que tout ça va l’amener dans de bien mauvais pas. Le détail intéressant,
outre l’intérêt du jeu en lui-même (qui est plutôt bon**), c’est qu’aucun livre
du Disque-Monde n’évoque ce personnage ni cet aspect de l’univers. Ce jeu est
donc en soi un élément indépendant, une vision pratchettienne de l’univers du
polar noir.
Et
une sacrément bonne vision : le scénario est complexe, les textes (le jeu
est très bavard : 1 300 pages de dialogue) sont pile dans
l’esprit, l’humour est présent et assez représentatif de celui de la série, et on
croise moult personnages bien connus, notamment le guet (Chicart et Vimaire,
essentiellement). Comme le jeu a des particularités plutôt sympas (notamment la
gestion des indices) et qu’il est assez long, je ne peux que vous conseiller
d’y jeter un œil si vous avez l’occasion*** (en admettant que vous ne soyez pas
sur Heart of the Swarm en ce moment,
comme c’est mon cas).
Discworld
Noir,
GT Interactive, 1999
* Un style qui est resté assez populaire outre-Manche. Souvenez-vous par exemple du Guide galactique, qui avant d’être une série de livres formidables et un film abject, est avant tout un feuilleton radio de Douglas Adams.
** Malgré un doublage français qui peut vite devenir
agaçant : l’acteur interprétant Lewton, qui ne cesse de soliloquer tout au
long des scènes, a choisi de surjouer à mort le personnage, ce qui peut vite
faire regretter la VO, relativement sobre à ce niveau.
*** Sachant qu’en plus, il est même en abandonware.
Bon, chez moi il plante sans arrêt, mais il doit bien y avoir un moyen.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire