lundi 18 mars 2013

Julien a vu… Au bout du conte



Vu le 9 mars 2013
Pierre s’est vu prédire sa mort prochaine mais il s’en fout, vu qu’il ne croit pas à toutes ces conneries et qu’il a déjà assez à faire avec sa nouvelle copine Éléonore qui s’est installée chez lui avec ses deux filles, Morgane et Johanna. Pendant ce temps Sandro, le fils de Pierre, rencontre Laura, jeune fille de bonne famille, et c’est le coup de foudre (au grand dam de Clémence, sa consœur de Conservatoire). La tante de Laura, Marianne, comédienne, aimerait reprendre des leçons de conduite (ça tombe bien, Pierre est moniteur d’auto-école) et s’inquiète pour sa fille Nina qui veut faire sa communion. Arrive Maxime, voisin de Marianne…
Vous trouvez que c’est compliqué ? Ben non en fait. Certes il y a pas mal de personnages mais le film prend son temps pour bien établir qui est qui par rapport à qui, et le rythme trompe efficacement l’ennui en attendant de saisir la marche des événements*. Voici donc le dernier film de Bacri-Jaoui, un duo (puisque apparemment ce n’est plus un couple) toujours aussi doué pour donner vie à des personnages vrais. Jouant cette fois sur les codes des contes de fée (quelques scènes oniriques font écho à Cendrillon, au Petit Chaperon rouge… sans finesse mais avec une certaine élégance), Agnès Jaoui décide de parler de la vie en général, des lubies enfantines (une petite fille soudainement obsédée par la Bible) à la crise de la cinquantaine (éternel Jean-Pierre Bacri dans le rôle de Jean-Pierre Bacri, que personne ne réussit aussi bien que lui), en passant par les amours de jeunesse et leurs avatars.
Elle glisse incidemment un peu de lutte des classes, évitant un écueil classique des « films français »**. Et assume complètement l’échec du mariage moderne, quasiment tous les familles ici présentes étant recomposées (à l’exception notable des parents de Laura, couple très bourgeois et pas du tout dysfonctionnel, avec père attaqué en justice pour pollution environnementale et mère botoxée à mort, chaleureuse comme un iceberg).
Niveau casting, pas de problèmes, jeunes et vieux jouent avec un naturel qui fait plaisir à voir. On notera juste l’étrange présence de Benjamin Biolay : le chanteur ne joue pas, il mise tout sur le charisme et, pour une raison qui m’échappe quelque peu, ça marche. Sa voix profonde, son élégance un peu effrayante suffisent à créer un personnage pourtant pas gagné d’avance.
Agnès Jaoui nous propose une tranche de vie qu’on a plaisir à suivre, n’oubliant jamais d’amuser tout en montrant des choses parfois graves, mettant sans cesse en avant des personnages pleins de vie, même quand ils ont du mal (Bacri, Bacri, toujours Bacri, aussi drôle qu’émouvant en éternel handicapé émotionnel mis face à la mort). Malgré quelques facilités*** (on ne peut pas dire qu’on nage dans l’originalité), c’est un vrai plaisir de cinéma. Je conseille.
Au bout du conte, Agnès Jaoui, 2013
* Et comme le disait Hervé, « Quand tu as lu Le Trône de fer, franchement, y a rien de compliqué ! »
** Vous aurez peut-être remarqué que dans beaucoup de longs-métrages « TF1 », le Français moyen travaille à la télé, dans une agence de pub ou un truc du genre. En dehors des films grolandais, les ouvriers se font rares (c’est bizarre, ils représentent quand même un quart des actifs). Certes dans Au bout du conte on n’a pas de travailleur à la chaîne, mais quand même du moniteur d’auto-école et de la bistrotière réalistes, ce qui n’est pas si mal.
*** C’est étonnant de voir comme une blague aussi éculée que « C’est ton petit ami ? Je l’ai pris pour le serveur » peut passer quand elle est bien tournée.

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