mardi 12 mars 2013

Julien a vu… Discword: Colour of Magic

Dans l’espace voyagent toutes sortes de mondes étranges, mais peu aussi étrange que le Disque-Monde. Galette aplatie reposant sur le dos de quatre éléphants gigantesques, eux-mêmes posés sur la carapace de la grande A’Tuin, tortue aux dimensions planétaires évoluant lentement mais sûrement au milieu du cosmos. Un monde de magie, d’intrigues et d’aventures. Un monde que nous allons découvrir en suivant Rincevent et Deuxfleurs*, un mage raté et un touriste, lors de fantastiques aventures… bienvenue chez terry Pratchett !
Ceux qui lisent régulièrement mon autre blog savent à quel point je suis fan de l’auteur anglais Terry Pratchett et de sa série des Chroniques du Disque-Monde. Inventivité, parodie et analyse très fine de notre société ont fait de cette petite série au départ sans prétentions un univers construit, cohérent et fascinant. Naturellement l’idée de l’adapter pour le grand ou le petit écran court depuis longtemps (les studios Disney ont même longtemps envisagé d’adapter Mortimer en long-métrage animé – ils y ont renoncé, et c’est à la fois un regret et un soulagement pour les fans).
Ce sont finalement les studios britanniques Sky qui se sont lancés dans l’aventure avec une mini-série de téléfilms : Hogfather en 2006*, puis The Colour of Magic. L’intrigue introduit de nombreux personnages récurrents des romans : Rincevent le mage raté, Deuxfleurs le touriste, Cohen le barbare sénile, le patricien Vétérini**, la Mort… et d’ores et déjà apparaissent les traits caractéristiques de ces productions : c’est génial et foireux, parfait et complètement raté, hyper respectueux et complètement à côté de la plaque.
En effet, les deux premiers téléfilms adaptent scrupuleusement les romans dont ils sont tirés. Trop scrupuleusement. Le résultat, dans le cas de The Colour of Magic, est un road-movie lancinant, bavard, s’étalant sur trois heures interminables. Rincevent et Deuxfleurs parcourent le Disque-Monde, rencontrant de multiples personnages hauts en couleur mais sans conséquence pour la suite, tandis que du côté de la grande ville d’Ankh-Morpork on assiste à la tout aussi interminable série d’assassinats des mages par un Tim Curry bien décidé à monter les échelons de sa hiérarchie.
C’est d’autant plus désolant que d’un point de vue technique, l’adaptation est grandiose : décors, costumes, mise en scène et bande son sont impeccables ! Les effets spéciaux sont très convaincants, on croit vraiment à cet univers sens dessus-dessous… et, aspect essentiel des films fantastiques réussis, les acteurs sont impeccables et croient vraiment à ce qu’ils font. On note d’ailleurs la présence de plusieurs grands noms : Sean Astin (Sam du Seigneur des anneaux) en Deuxfleurs, Jeremy Irons (qui fait agréablement oublier sa prestation délirante de Donjons et Dragons) en patricien stoïque et David Bradley (bien connu des fans pour son rôle de Rusard dans les films Harry Potter) en Cohen. Et l’excellent David Jason en Rincevent plus vrai que nature (un rôle pourtant peu évident). Seul Tim Curry, le travesti transylvanien du Rocky Horror Picture Show, cabotine en méchant mage et fait tache au milieu… mais au moins propose-t-il quelque chose à voir.
En résumé, et ça me navre, mais ce téléfilm ennuie plus qu’autre chose, malgré la somme incroyable de talent mise en œuvre. À trop vouloir suivre la trame d’un livre, on perd de vue que les deux médias ont deux rythmes bien différents. Et le génie de Pratchett, qui s’affiche autant dans ses intrigues que dans son analyse sociétale, peine à transparaître à travers cette œuvre trop graphique et pas assez dynamique***. Raté. Mais ce n’est que le premier.
The Colour of Magic, Jean Vadim, 2008

* Dont je reparlerai demain : en effet The Colour of Magic est adapté des deux premiers romans du Disque-Monde, et devrait être visionné en premier par tous les fans (d'autant que dans cet ordre, la qualité va croissante). 

** J’emploierai pour cette série de chroniques les traductions françaises, d’une part parce que ce sont les plus connues de ce côté-ci de la Manche, et d’autre part parce que le traducteur Patrick Couton a gagné suffisamment de prix pour son travail sur la série pour mériter un petit hommage

*** D’autant que La Huitième Couleur et Le Huitième Sortilège, les deux premiers livres, s’ils posent les bases de l’univers du Disque-Monde, ne sont pas les meilleurs de la série, loin s’en faut.

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