jeudi 31 janvier 2013

Julien a vu… Harry Potter and le Goblet de feu

Vu le 8 décembre 2005
Harry revient. Il est plus grand, plus musclé*, moins bien peigné et il a la baguette magique qui le démange. D’ailleurs, dans tout Poudlard, l’heure de l’adolescence a sonné : acné, cheveux fous et blagues débiles. Les filles en fleur connaissent des accès de romantisme, les petits cons deviennent des jeunes cons. Et pendant ce temps, Harry se tape des dragons, des ondines, des haies mutantes et Dark Vador prépare sa résurrection, en toute simplicité…
 
Après Chris Columbus (que personne ne regrette) et Alfonso Cuarón (qui avait prouvé que le mot « adaptation » a encore un sens), place à Mike Newell, monsieur 4 mariages et 1 enterrement (mais pas que). Celui-ci a choisi d’axer son film vers la dimension scolaire. Poudlard est un collège, les gamins ont quatorze ans, logiquement ça doit frétiller dans tous les sens. Et pour frétiller ça frétille ! Harry et Ron sont en passe de devenir les deux plus grands losers de la littérature enfantine (« Tu comptes me faire danser, oui ou non ? – Non. »), pour notre plus grand plaisir. On en oublierait presque notre petite Hermione, décidément bien jolie, et Ginny qui commence enfin à avoir un rôle (tout petit, mais bon, quand on connaît la suite, il vaut mieux la valoriser).

Parallèlement, les nouveaux comme les anciens semblent prendre un plaisir certain à jouer les profs. Alan Rickman s’amuse follement dans son rôle de Rogue toujours aussi ambigu, Brendan Gleeson campe un Maugrey Fol Œil plus vrai que nature et Michael Gambon est autant Dumbledore que Ian McKellen était Gandalf. Quant à Ralph Fiennes, son interprétation de Lord Voldemort (« Il revient, Voldemort, le capitaine corsaire… » euh non…) est à mon avis un tour de force, tout de cabotinage contenu, exactement comme est supposé l’être le grand méchant de la série.

Cependant, pour adapter La Coupe de feu en « seulement » deux heures quarante de film, pas de secret : il faut trancher. Alors Newell a tranché, net, sec, à la tronçonneuse. Exit Ludo Verpey et ses magouilles, le Front de libération des elfes de maison, l’usage de l’argent du prix des Trois Sorciers, les scroutts à pétard, Winky l’elfe dépressive, les échanges épistolaires avec Sirius, les origines d’Hagrid et de madame Maxime, la vélanité de Fleur, la sécession d’avec le ministère, la perversité de Rita Skeeter, les longues explications finales, bref adieu tous les petits détails qui donnent à l’ensemble un goût de quotidien et surtout qui noient les éléments importants. 

Du coup ceux qui n’ont pas lu le bouquin risquent de ne pas très bien comprendre pourquoi tout le monde en vante l’intrigue démoniaque. Il faut préciser que si, dans le film, une personne un peu attentive, aux neurones raisonnablement connectés, peut deviner la fin, il n’en est rien dans le bouquin qui laisse invariablement sur le cul. À la décharge de Newell (je ne lui en veux pas, j’avais lu le bouquin avant), c’était totalement impossible ici. D’ailleurs, en expédiant dès le début cent cinquante pages de livre en dix minutes, le réalisateur déclare clairement qu’il n’a pas de temps à perdre. Quitte à ne faire qu’effleurer des sujets graves (les parents de Neville, le passif de Rogue, les fondements du futur Ordre du Phénix…) afin de se ménager de précieuses minutes pour installer la dynamique du groupe d’élèves, en particulier les jumeaux Weasley, plus présents qu’à l’accoutumée.
 
À l’arrivée, le film passe vite (trop vite parfois : on se dit que Newell, s’il a su choisir intelligemment ses ellipses, aurait pu investir dans quelques transitions), mais laissera aux fans une impression de manque. Un peu comme si on avait adapté Le Seigneur des anneaux en se limitant à la scène de la Moria. Et, contrairement aux assertions ashreiennes de certain de mes amis**, il n’aurait pas suffi de deux, voire trois films pour adapter le livre dans son intégralité. La dynamique du quatrième tome, comme des suivants d’ailleurs, n’est pas très cinématographique. Il s’agit d’œuvres bâties sur la longueur, avec un quotidien fait de petits événements plus ou moins grandioses mais tous importants et qui se suivent. Ce n’est souvent que vers la fin que tout se révèle, le reste n’étant pas très spectaculaire (les épreuves, très soulignées dans le film car très visuelles, n’ont qu’une importance toute relative dans le support papier). À mon avis, le média le plus adapté serait encore la série télé. Mais bon, avant que Harry Potter soit réadapté, on a un peu de temps.

Petit détail supplémentaire, j’ai pu profiter des deux versions (française et originale). Je vais essayer d’être clair sans être lapidaire, constructif sans être limitatif, concis sans être court : la VF est une incommensurable merde dont les coupables doivent être écartelés***.
Harry Potter and the Goblet of Fire, Mike Newell, 2005

* Si, si, matez-le dans la scène du bain ! Il fait des tractions le Danny Radcliffe ! 

** Ashreien, adj. qual., se dit de l’attitude consistant à émettre une opinion particulièrement tranchée et argumentée sur un sujet dont on ne connaît rigoureusement rien. Souvenons-nous de ce mode de discussion culte : « Tu as vu [Insérez ici un titre d’œuvre quelconque] ? – Quoi, cette merde ? [Insérez ici une heure de vive palabre sur la qualité hautement discutable de l’œuvre en question] En même temps, je dis ça, mais bon, je l’ai pas vu hein ! »

*** Malgré la présence de pointures du doublage comme Philippe Dumat (voix célébrissime de Gargamel, Satanas, M. Drumond, etc.) qui double ici Fudge, le ministre de la Magie. En fait, les adultes sont très bien doublés (surtout Rogue). Les gamins par contre…

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire